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07/04/2022

Poèmes pour petits et grands (180)

Sabine sicaud.jpgPrintemps

 

Et puis, c’est oublié.

Ai-je pensé, vraiment, ces choses-là ?

Bon soleil, te voilà

Sur les bourgeons poisseux qui vont se déplier.

Le miracle est partout.

Le miracle est en moi qui ne me souviens plus.

Il fait clair, il fait gai sur les bourgeons velus ;

Il fait beau — voilà tout.

Je m’étire, j'étends mes bras au bon soleil

Pour qu’il les dore comme avant, qu’ils soient pareils

Aux premiers abricots dans les feuilles de juin.

L’herbe ondule au fil du chemin

Sous le galop du vent qui rit.

Les pâquerettes ont fleuri.

Je viens, je viens ! Mes pieds dansent tout seuls

Comme les pieds du vent rieur,

Comme ceux des moineaux sur les doigts du tilleul.

(Tant de gris au-dehors, de gris intérieur,

De pluie et de brouillard, était-ce donc hier ?)

Ne me rappelez rien. Le ciel est si léger !

Vous ne saurez jamais tout le bonheur que j’ai

À sentir la fraîcheur légère de cet air.

Un rameau vert aux dents comme le « Passeur d’eau »,

J’ai sans doute ramé bien des nuits, biens des jours…

Ne me rappelez rien. C’est oublié. Je cours

Sur le rivage neuf où pointent les roseaux.

Rameau vert du Passeur ou branche qu’apporta

La colombe de l’Arche, ah ! la verte saveur

Du buisson que tondra la chèvre aux yeux rêveurs !

Etre chèvre sans corde, éblouie à ce tas

De bourgeons lumineux qui mettent un halo

Sur la campagne verte — aller droit devant soi

Dans le bruit de grelots

Du ruisseau vagabond — suivre n’importe quoi,

Sauter absurdement, pour sauter — rire au vent

Pour l’unique raison de rire… Comme Avant !

C’est l'oubli, je vous dis, l’oubli miraculeux.

Votre visage même à qui j’en ai voulu

De trop guetter le mien, je ne m’en souviens plus,

C’est un autre visage — et mes deux chats frileux,

Mon grand Dikette-chien sont d’autres compagnons

Faits pour gens bien portant, nouveaux, ressuscités.

Bon soleil, bon soleil, voici que nous baignons

Dans cette clarté chaude où va blondir l’été.

Hier n’existe plus. Qui donc parlait d’hier ?

Il fait doux, il fait gai sur les bourgeons ouverts…

 

(Sabine Sicaud)

08:48 Publié dans Concept | Lien permanent | Commentaires (0)

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